Wednesday, April 14, 2021

Fransa DB Devlet Sekreteri Clément Beaune, "France Info TV"de soruları yanıtlıyor. Türkiye ile ilgili bölüm (09 Nisan 2021)

 

Affaires européennes - Royaume-Uni - COVID-19 - Vaccins - Irlande du Nord - Langue française - Plan de relance européen - Turquie - Entretien de M. Clément Beaune, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé des affaires européennes, avec "France info TV" - Extraits (Paris, 09/04/2021)

.../...

Q - Parfait, c'est l'heure de la confrontation du débat dans cette émission. Recep Tayyip Erdogan, a-t-il, ou non, infligé un camouflet insupportable à l'Union européenne ? C'est le "sofa gate", comme nous avons coutume de l'appeler désormais. On va voir les images qui agitent les capitales européennes. On voit là Charles Michel avec Recep Tayyip Erdogan et la présidente de la Commission à droite. Les deux s'assoient et elle, ne s'assoit pas. Elle se retrouve, si je puis dire, sur un canapé, un petit peu à l'écart. (...)

R - Merci. Je crois effectivement que l'on a sorti l'Europe d'une forme d'aveuglement sur la Turquie. Mais pour répondre à l'épisode du " sofa gate ", ce qui est très intéressant, c'est qu'en tant qu'Européens, beaucoup se sont sentis humiliés, et je pense qu'il y a des raisons pour cela, et qu'on a le chic pour traiter cela comme des Européens, en se blâmant nous-mêmes ; c'est-à-dire qu'on a expliqué qu'il y en a un qui aurait dû laisser sa place à l'autre, etc. D'abord, je voudrais expliquer, il y a un protocole européen, c'est vrai, il faut le dire, puisque l'on ne l'a pas clairement établi. C'est comme cela. Charles Michel a la préséance sur Mme von der Leyen. Donc, qu'il y en ait un qui soit, si je puis dire, au-dessus de l'autre, ce n'est pas choquant. Moi, je crois quand même que les Turcs, qui sont habiles, en ces affaires, jouent avec les symboles. Là où je trouve que c'est intéressant sur le fond, c'est que beaucoup de puissances qui sont à nos portes et qui sont menaçantes, la Turquie, la Russie, dans un autre registre, savent jouer sur tout le registre des symboles, de la géopolitique, des images, et que nous, Européens, ce n'est pas cela le centre du problème, mais cela révèle quelque chose sur nous-mêmes, c'est que nous sommes un peu "bisounours" ou naïfs pour reprendre le terme de tout à l'heure, face à ces images ou à ces symboles qui frappent et qui restent. Si l'on en parle, parce que le plus intéressant, c'est que l'on parle du "sofa gate" depuis le début de la semaine. Personne n'a dit ce qu'il s'est passé au fond, alors qu'il y a eu plein de choses intéressantes, dans cette rencontre, Michel, von der Leyen, Erdogan, à Ankara. On a plutôt été ferme à son égard.

Q - Mais pour dire clairement les choses, vous êtes moins clément sur cette affaire, sur cet épisode à l'égard d'Erdogan, que ne l'est Jean-François Colosimo. Vous pensez qu'il y a vraiment une volonté de nous humilier ou de nous tester ?

R - Je crois. Et je crois que dans cet épisode, on l'a vu d'ailleurs sur les livraisons de masques, on le voit aujourd'hui sur le vaccin que les Russes utilisent, ils n'ont pas pour eux-mêmes, le vaccin Spoutnik, ils vaccinent deux fois moins que nous, et ils le distribuent au compte-goutte à des pays européens pour créer de la division. Je fais masse de tout cela parce que cela veut dire que la guerre géopolitique, non pas au sens militaire, mais au sens des combats de modèles de sociétés, de valeurs, est aussi, - ils l'ont bien compris, les Russes comme les Turcs -, une guerre d'images, une guerre de symboles. Et avec cela, ils ont marqué un point, puisqu'ils ont vexé, à juste titre, les Européens, en jouant d'un coup sur tous les registres, l'égalité homme-femme, la rivalité institutionnelle etc.

Q - Ce qui est dévastateur pour l'Europe ?

R - Oui. Alors, après, il ne faut pas, nous-mêmes, que l'on y passe trop de temps, et je suis d'accord avec Jean-François Colosimo sur le fait qu'il y a beaucoup plus grave que ça dans l'agenda turc...

(...)

R - Je suis d'accord avec vous là-dessus, sur le fait qu'il y ait eu longtemps une faiblesse coupable de l'Europe et que c'est la France qui a, malgré tout, j'aimerais que l'on aille un peu plus loin, fait changer de regard, d'abord, et fait changer d'attitude l'Europe. Je prends un exemple très simple. Il y en a, pour revenir sur les sanctions que nous aurions pu prendre à d'autres moments, etc. Mais regardez ce qu'il s'est passé dans le dernier, ce que vous avez appelé "racket", ou pression : quand M. Erdogan a dit, parce que cela a été organisé par les autorités turques, à des immigrés, à des migrants qui étaient sur le territoire turc, "allez à la frontière grecque, vous passerez en Europe", et cela a été organisé dans des bus par les autorités turques. On leur a dit "allez-y", donc c'était délibéré ; il a mis une pression à la frontière, pour nous tester, et demander sans doute un peu d'argent au passage, mais nous tester. C'était exactement, il y a un an, en février 2020. Nous avons, et pour le coup, il y a eu une visite extrêmement utile de Mme von der Leyen et M. Michel qui sont allés à la frontière grecque et qui ont dit "l'Europe tiendra". C'était une image, c'était un symbole, ils n'y sont pas allés avec des chars, mais c'était une image et c'était un symbole. On a aussi renforcé nos actions avec Frontex, l'agence des gardes-frontières européens. Mais là, M. Erdogan s'est dit "cette fois, ils vont réagir" et d'ailleurs, il a enlevé la pression très, très vite, parce que l'on a tenu avec les Grecs, la frontière de la Grèce et la frontière de l'Europe. Donc, cela veut dire que c'est possible et que quand l'Europe montre un peu ses muscles, simplement, cela peut être des exercices navals en Méditerranée, cela peut être cette pression que l'on a tenue et retenue à la frontière, on est capable de répondre.

(...)

Q - Excusez-moi, il reste, il reste une minute, je voudrais aborder un problème qui concerne les Français avec la Turquie. Le Président de la République a dit l'autre jour dans son interview à la télé grecque, je crois, avec Nikos Aliagas, qu'il craignait des tentatives d'ingérence de la Turquie, dans l'élection présidentielle. Est-ce que c'est probable ? A quoi pensait-il ?

(...)

Q - Clément Beaune, est-ce qu'il y a réellement des risques d'ingérence de la Turquie dans l'élection présidentielle de 2022 ? Et si oui, en quoi ? En 30 secondes.

R - Sans doute, mais surtout, il y a déjà des ingérences. Ce ne sont pas juste des cyberattaques. Les ingérences, c'est le financement de lieux de culte, c'est la propagande sur les réseaux sociaux. Et cela, regardez, c'est déjà à l'oeuvre. Et donc, ce n'est pas seulement une menace potentielle pour l'élection présidentielle, cela peut arriver, il ne faut pas être naïf, c'est ce qui se passe déjà. On parle beaucoup de la Russie, mais il y a une stratégie d'ingérence, par les réseaux sociaux, par les lieux de culte, par la dénonciation auprès des communautés turques de France de notre loi sur le séparatisme et sur la République, qui pose problème./.

 

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