Friday, October 4, 2024

Fransa Başbakanı Barnier'in Senatoda konuşması - Politique étrangère - Déclaration de politique générale de M. Michel Barnier, Premier ministre, au Sénat - Extraits (Paris, 02/10/2024)

 Politique étrangère - Déclaration de politique générale de M. Michel Barnier, Premier ministre, au Sénat - Extraits (Paris, 02/10/2024)



Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Sénateurs,

Merci sincèrement, Monsieur le Président, pour votre invitation à m'exprimer très vite devant vous. Merci pour votre accueil, auquel je suis sensible, et qui d'ailleurs ne me surprend pas dans une assemblée que je connais assez bien, puisque j'ai eu l'honneur d'y siéger un court moment, pendant deux ans. Mais je n'ai rien oublié et de la cordialité, du respect réciproque, mutuel, et de la qualité des travaux du Sénat. Donc je suis, pour cette raison aussi, plus personnelle, heureux de vous retrouver.

Et au lendemain de la déclaration de politique générale, je remercie le Garde des sceaux, Didier Migaud, qui est ici, de l'avoir lue en mon nom, au moment même où je la prononçais à l'Assemblée nationale. Je suis heureux de vous retrouver pour faire le point, peut-être après vous avoir écouté, ou avant même de vous avoir écouté, de préciser un certain nombre de sujets ou d'enjeux sur lesquels le Sénat est traditionnellement plus engagé.

Je suis très heureux de saluer votre assemblée, qui représente évidemment d'abord les élus locaux - de métropole, d'outre-mer, de l'étranger -, les citoyens aussi, et d'évoquer la feuille de route du Gouvernement.

Peut-être, juste avant, Monsieur le Président, permettez-moi d'évoquer la situation grave du Proche et du Moyen-Orient, puisque l'escalade continue, et face à cette escalade dangereuse des tensions, vous confirmer que la France, sous l'autorité du Président de la République, restera engagée pour la paix et la sécurité de tous dans cette région. Nous avons condamné avec la plus grande fermeté les nouvelles attaques de l'Iran contre Israël. Et je redis aussi devant le Sénat ce que j'ai dit à l'Assemblée : pour nous, pour la France, la sécurité d'Israël n'est pas négociable.

Quelques jours avant le très triste anniversaire du 7 octobre, nous pensons à toutes les victimes des attaques terroristes du Hamas et du Hezbollah, qui doivent cesser. Nous pensons aussi à tous les otages, dont nous continuons d'exiger la libération, qui incluent naturellement nos deux compatriotes. Nous pensons aussi, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, à toutes les victimes civiles palestiniennes. La violence n'a que trop duré. Et voilà pourquoi la France, avec d'autres, appelle à un cessez-le-feu à Gaza.

Au-delà de cette stratégie, nous savons que la clé de la paix, et c'était mon discours déjà, lorsque j'avais l'honneur d'être le ministre français des affaires étrangères, sous la présidence de Jacques Chirac, nous continuerons de souhaiter, de travailler, de militer - pas tous seuls, avec les pays de la région, avec les Etats-Unis et d'autres puissances - pour la clé de la stabilité, de la sécurité durable dans cette région, qui est cette clé de la solution à deux Etats. Même si elle est de plus en plus difficile, même si elle paraît improbable à certains, moi, je continue à penser qu'il faut, à côté d'un Etat d'Israël garanti dans son intégrité territoriale, dans sa sécurité, définitivement, par tous les pays de la région, offrir une perspective, proposer une perspective, celle d'un Etat au peuple palestinien.

L'aggravation de la situation au Liban, un pays qui nous est très cher, que je connais assez bien, exige aussi notre pleine mobilisation avec nos partenaires, pour faire cesser les hostilités qui s'enclenchent et qui menacent elles aussi toute la stabilité de la région. Nous nous sommes engagés - le ministre de la défense, sous l'autorité du Président de la République - à apporter une aide humanitaire aux victimes civiles des combats et nous sommes prêts à toutes les éventualités.

Je rappelle, s'agissant du Liban, que 20.000 de nos compatriotes vivent dans ce pays et que nos soldats y sont déployés, près de 700 soldats, au sein de la FINUL. Donc nous mettrons tout en ouvre pour protéger nos compatriotes, au Liban en particulier, mais aussi au Moyen-Orient, et les assister dans toutes les circonstances douloureuses qu'ils traversent.

Ayant évoqué la situation internationale, vous me permettrez de confirmer, là aussi, que la France reste et restera aux côtés du peuple ukrainien qui, deux ans et demi après l'agression russe, continue avec courage de se battre pour défendre son intégrité territoriale, sa souveraineté, sa liberté.

Ce sont des mots, ce sont des valeurs, ce sont des réalités qui sont les nôtres, en tant qu'Européens. Et voilà pourquoi nous devons soutenir ce peuple si courageux de l'Ukraine, qui défend là, au risque et au prix de beaucoup de morts, les valeurs européennes que nous avons en partage.

Face à ces conflits, Mesdames et Messieurs les Sénateurs, face à l'instabilité persistante d'un monde qui est de plus en plus dangereux, instable, fragile aussi, face à toutes les menaces hybrides, celles qu'on connaît, celles qu'on soupçonne, voilà pourquoi l'effort de défense engagé par le Gouvernement depuis plusieurs années - et là encore, le Président de la République est pilote - est évidemment nécessaire et sera poursuivi.

Mesdames et Messieurs les Sénateurs et Sénatrices,

Vous connaissez désormais les grandes orientations du Gouvernement, ce Gouvernement qui a été formé il y a quelques jours. Moi-même, je suis arrivé à ce poste, dans cette mission de Premier ministre, il y a 27 jours à peine, 27 jours, après une longue attente, non pas de ma part, mais une longue attente depuis les élections législatives, dans une situation d'ailleurs assez inédite, puisque pour la première fois depuis le début de la Vᵉ République, il n'y a pas du tout de majorité à l'Assemblée nationale. Je connais cette difficulté. Je sais que les députés ont le sort du Gouvernement dans leurs mains. Et pour autant, je pense que les deux années et demi qui sont devant nous doivent être utiles.

Et vous avez votre part à prendre dans ce travail d'intérêt national, comme je le souhaite.

Je les ai appelés à cela, les parlementaires de tous les bords et de tous les groupes, à l'Assemblée nationale. Nous allons essayer de faire beaucoup avec peu, comme je l'ai rappelé hier, en citant cet ordre de mission que le général de Gaulle avait adressé en mai 42 à Pierre de Chauvigné, l'un de ses aides de camp, qui l'envoyait à Washington pour tenter de créer une antenne de la France libre dans des conditions assez difficiles. Et il lui écrivait de sa propre main : "Je vous demande de faire beaucoup avec peu, et en partant de presque rien".

Alors, nous ne partons pas de presque rien. Il y a tellement de ressources, d'énergie, de volontaristes dans notre pays, à tous les niveaux, que c'est ça, la base. Mais ce qui est vrai, c'est qu'on a peu dans nos mains - j'y reviendrai sur le budget - et qu'il faut faire beaucoup. Et à défaut de faire beaucoup dans tous les domaines, il faut s'efforcer de faire bien. Et c'est précisément l'intention du Gouvernement.

La feuille de route que nous avons exposée hier à la représentation nationale, à l'Assemblée et devant vous, est centrée autour de quelques priorités, pour tenter de donner à notre pays des marges d'action dans une situation particulièrement difficile. Evidemment, la première exigence, parce que c'est une précondition pour agir et pour rester crédible au plan international, c'est d'améliorer la situation de nos comptes publics.

(...)

J'ai parlé tout à l'heure de la deuxième dette qui est à mes yeux importante, celle de l'empreinte environnementale. Les transitions écologiques et énergétiques seront des priorités de l'action du Gouvernement. Face à ce défi, là aussi, nous sommes tous concernés - entreprises, collectivités et citoyens. Et je n'ai pas besoin de rappeler, dans ma propre histoire personnelle, l'engagement qui était le mien très tôt, puisque j'ai eu la chance d'être membre du cabinet, tout jeune chargé de mission, de Robert Poujade, le premier ministre français de l'environnement, le premier ministre qu'avait créé Georges Pompidou. Nous étions à l'époque le deuxième pays d'Europe, après l'Angleterre, à nous doter d'un ministère de l'environnement.

(...)

Peut-être puis-je évoquer, Monsieur le Président, au terme de cette intervention, ou presque au terme, la question de la maîtrise de l'immigration, qui aussi est un grand sujet que je veux qu'on aborde, là encore, avec de la dignité, avec de la fermeté. En regardant les faits avec lucidité, nous ne maîtrisons plus de manière satisfaisante notre politique migratoire et, du coup, nous ne sommes plus en mesure d'assurer objectivement, de manière satisfaisante, nos objectifs d'intégration. Et donc on échoue des deux côtés, et ça ne peut pas durer. Il faut, sans idéologie, sans accepter je ne sais quelle polémique, j'ai dit hier, dans un moment d'utopie, que la question de l'immigration devrait être un sujet d'intelligence nationale. Alors, on va s'efforcer d'aller dans ce chemin et voilà pourquoi on va travailler plus efficacement et en proximité des demandes d'asile, pour que les demandeurs obtiennent rapidement une décision. Nous proposerons aussi de faciliter la prolongation exceptionnelle de la rétention des étrangers en situation irrégulière pour mieux exécuter les obligations de quitter le territoire. L'actualité tragique montre à quel point ce plan est important.

Nous allons renforcer le contrôle de nos frontières. Il y a une décision européenne importante qui a été prise, le Pacte européen sur la migration et l'asile, auquel M. Darmanin, d'ailleurs, a beaucoup consacré d'énergie. Il faut l'appliquer sans délai, mais le compléter aussi en renforçant les moyens de Frontex, qui doit retrouver sa mission première de garde-frontière de l'Union européenne. Et puis, nous continuerons aussi longtemps que ce sera nécessaire et là où ce sera nécessaire, à rétablir des contrôles à nos propres frontières intérieures. Les règles européennes le permettent. Et l'Allemagne, d'ailleurs, vient de le faire de son côté.

Je voudrais aussi vous confirmer que nous allons intensifier le dialogue avec les pays d'origine et de transit. Mon Gouvernement ne s'interdira pas de conditionner davantage l'octroi de visas à l'obtention de laissez-passer consulaires, dont nous avons besoin pour les reconduites à la frontière. Et nous allons également poursuivre, avec les pays concernés, une discussion sur des accords bilatéraux, parfois très anciens, qui ne correspondent plus aux réalités d'aujourd'hui.

(...)

Je ne peux pas conclure ce propos sans vouloir répéter tout ce que je vous ai fait dire hier, sans évoquer nos Outre-mer. Je souhaitais suivre personnellement ces sujets en liaison avec le nouveau ministre des outre-mer, qui est placé auprès du Premier ministre. Je crois que nous avons besoin d'une volonté politique forte, durable, de considération, de suivi à Paris, pour relever les défis qui sont très nombreux. Nous le ferons en privilégiant le dialogue avec les élus, avec les acteurs économiques et sociaux dans ces territoires, en respectant leur diversité, leur spécificité, la culture de ces territoires. Il y a dans les Outre-mer des handicaps structurels. Il y a aussi des projets, des échanges, des opportunités qui n'intéressent pas que l'Outre-mer, qui intéressent la recherche, l'Espace, la biodiversité, pour le profit de toute la collectivité nationale.

Et donc, nous allons travailler avec eux dans cet esprit-là, avec un accompagnement renforcé de l'Etat - soutien financier, appui en ingénierie, soutien dans les relations internationales dans leur bassin régional. Et cet accompagnement doit se traduire par des contrats pluriannuels, là où il n'existe pas encore, et qui doit être garanti et mis en oeuvre au quotidien par l'action des services locaux et centraux de l'Etat. J'ai parlé du comité interministériel de l'outre-mer qui se réunira au premier trimestre, l'année prochaine, et qui sera préparé par le ministre, en lien étroit avec tous les élus de l'ensemble de ces territoires, et nous y déciderons de mesures concrètes.

(...)

Faire un compromis, ce n'est pas se compromettre. On ne vient pas du même endroit, on ne va pas tous au même endroit, mais pendant un temps et sur certains sujets, on se met d'accord. Moi, j'ai été, pendant 10 ans, commissaire européen. Tous les textes que j'ai pu faire passer, notamment pour la régulation financière après la crise financière qui a détruit des millions d'emplois, pour reconstruire un peu de règles, de morale, de responsabilité chez des banquiers et d'autres acteurs financiers qui n'en avaient pas beaucoup et qui se croyaient tout permis, parce qu'on leur avait tout permis dans une sorte de grand vent d'ultralibéralisme pendant 30 ans... J'ai reconstruit à travers 41 lois de régulation. Aucune de ces lois n'a pu passer sans le compromis entre le Parti socialiste européen, le Parti populaire européen, le centre droit, les Verts, les libéraux et parfois les communistes. Aucune. Je les ai toutes fait passer, ces 41 lois, à travers des compromis. Et personne n'a perdu son âme, personne n'a perdu sa différence, mais nous avons réussi.

(...)

En tout cas, je suis très heureux, Monsieur le Président, de m'être exprimé devant vous. Je vais vous écouter maintenant parce qu'ici, on sait s'écouter et se respecter. On sait ce que ça veut dire de trouver des compromis tout en gardant ces différences. On sait aussi, et j'en termine, que l'effet de suivi et l'effet d'évaluation est aussi important que l'effet d'annonce. Voilà l'état d'esprit du Gouvernement et de son Premier ministre. Merci à tous./.

(Source : site Internet du Gouvernement)

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