Friday, October 28, 2022

Déclaration du Gouvernement - Discours de Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, au Sénat (Paris, 26/10/2022)

 



1. Ukraine - Déclaration du Gouvernement relative à la guerre en Ukraine et aux conséquences pour la France, suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution - Discours de Mme Catherine Colonna, ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, au Sénat (Paris, 26/10/2022)

Monsieur le Président,

Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs,

Tout comme la Première ministre, les orateurs des différents groupes qui se sont succédés à la tribune l'ont tous rappelé : la Russie a fait depuis huit mois désormais le choix - le choix - de ramener la guerre sur notre continent. Cette crise est grave, elle nous concerne tous.

L'Ukraine voit sa souveraineté, son intégrité territoriale menacées par l'agression de la Russie, un Etat doté de l'arme nucléaire, un Etat qui, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité, a une responsabilité particulière pour défendre le système international et la Charte des Nations unies, mais qui fait aujourd'hui le choix de remettre en cause leur fondement même. Cette agression n'est pas soutenue par la population russe, tout le démontre. Elle n'est voulue que par des gouvernants pour lesquels le droit et la vérité ne sont devenus que de simples options. Un pouvoir russe qui conduit, depuis plus de trois semaines maintenant, des bombardements massifs contre des cibles civiles ukrainiennes dans tout le pays, avec un objectif assumé : casser ses infrastructures et briser la résistance du peuple ukrainien, en l'exposant au froid et à la faim, alors que l'hiver approche. Un pouvoir russe qui n'hésite pas à faire des dizaines de millions de réfugiés et déplacés, commet crime sur crime et s'enferme dans une impasse diplomatique, militaire et politique. Un pouvoir russe qui recourt au mensonge une nouvelle fois, en osant prétendre que l'Ukraine s'apprêterait à faire exploser une "bombe sale" sur son propre territoire. Nous avons aussitôt dénoncé cette manipulation et nous y consacrons beaucoup de nos efforts diplomatiques, ces jours derniers, en lien notamment avec l'AIEA, et au Conseil de sécurité qui devrait en débattre demain, à notre demande.

Notre détermination ne doit pas vaciller. Le Président de la République et la Première ministre l'ont rappelé : nous soutenons l'Ukraine parce qu'elle se bat pour des valeurs démocratiques, ces valeurs qui sont les nôtres. Nous la soutenons aussi car si nous laissons la Russie bousculer les principes les plus fondamentaux de la vie internationale, tout sera permis, non seulement en Ukraine, mais ailleurs. En aidant l'Ukraine à se défendre, nous défendons les principes essentiels de non-agression, d'intégrité territoriale, de souveraineté et de règlement pacifique des différends, consacrés par la Charte des Nations unies. Nous sommes aux côtés de l'Ukraine depuis le premier jour de l'agression, par des sanctions, pour entraver l'effort de guerre russe et toucher ceux qui collaborent avec elle, Biélorussie ou Iran - nous l'avons fait et nous le referons si nécessaire - et par une aide diplomatique, économique, humanitaire et, bien sûr, militaire. À l'approche de l'hiver, nous accentuons notre soutien humanitaire et préparons de nouvelles opérations pour répondre à l'urgence, après avoir fait parvenir récemment, par exemple, 1000 tonnes d'aide humanitaire aux populations. Une part importante de l'action du Centre de crise et de soutien du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, y est désormais consacrée, et nous prévoyons la livraison de générateurs, de matériel de chauffage et de matériel de reconstruction très prochainement, pour environ 50 millions d'euros ; de même que nous envisageons la tenue d'une conférence internationale à Paris, dans quelques semaines, pour aider à la résilience du peuple ukrainien, sur initiative du Président de la République. Nous sommes aussi aux côtés de l'Ukraine pour garantir que les auteurs des exactions et des crimes de guerre, ou des crimes contre l'humanité, soient poursuivis. Nous y contribuons en soutenant concrètement l'action de la Cour pénale internationale et les enquêtes engagées par la justice ukrainienne. Mais nous sommes également aux côtés de nos partenaires et de nos alliés face à la menace que la Russie fait peser sur leur sécurité. C'est l'honneur et la responsabilité de la France, en tant que première puissance militaire du continent, que d'être présente en Lituanie, en Pologne, en Roumanie et en Estonie, où je me suis rendue hier, en accord avec le ministre des Armées, pour marquer notre soutien à ce pays, mais aussi pour rendre visite à nos forces.

Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs,

La Russie est de plus en plus isolée. Le vote qui s'est tenu à l'Assemblée générale des Nations unies, le 12 octobre, l'a clairement démontré. Les mois d'efforts diplomatiques du Kremlin pour tenter de justifier l'injustifiable se sont soldés par une condamnation massive de l'agression et de l'annexion illégale de territoires ukrainiens. Croyez-bien que ce résultat est aussi le résultat de nos propres efforts diplomatiques et de ceux de nos proches partenaires. Et de même, s'il y a une présence de l'Agence internationale de l'énergie atomique à Zaporijjia - contrairement à ce que j'ai entendu, il y a une présence -, c'est aussi largement grâce à l'action du Président de la République et de la diplomatie française.

En aidant l'Ukraine, en isolant la Russie, en luttant contre l'impunité, nous faisons notre devoir de solidarité. Nous faisons notre devoir d'humanité. Nous défendons la sécurité du continent européen, c'est-à-dire la nôtre. Et nous le ferons donc aussi longtemps qu'il sera nécessaire.

Je vous remercie./.


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