POINT DE VUE. Plan de relance européen : une
réponse à la hauteur
Les dirigeants européens ont conclu mardi 21 juillet un accord historique
sur un plan de soutien à leurs économies frappées par la crise du coronavirus,
basé pour la première fois sur une dette commune, après quatre jours d’un
sommet marathon sous haute tension à Bruxelles. Commentaire de Jean-Dominique
Giuliani, président de la Fondation Robert Schuman.
« Une étape
majeure a été franchie », a affirmé Emmanuel Macron, lors d’une conférence de
presse commune avec Angela Merkel. Il s’agit d'« une réponse à la plus grande
crise de l’UE depuis sa création », a ajouté la chancelière allemande, dont le
pays préside actuellement l’Union. | EPA/MAXPPPAfficher le diaporama
Ouest-FranceJean-Dominique
GIULIANI (*).Publié le 22/07/2020 à 06h00
Ce fut laborieux mais les 27 États
membres de l’Union européenne ont fini par s’accorder. Pour faire face aux
conséquences de la crise sanitaire, un plan de relance exceptionnel de 750
milliards € viendra renforcer les 1 074 milliards € du budget de 7 ans qu’ils
ont adopté. Ces crédits s’ajoutent aux facilités considérables annoncées par la
Banque centrale européenne, plus de 1 200 milliards € et aux plans nationaux
lancés par les gouvernements. Au total, l’Europe mobilisera près de 4 000
milliards € pour soutenir son économie, en privilégiant l’investissement dans
les activités et les emplois d’avenir. C’est plus qu’aucun autre ensemble
politique dans le monde. Cette réponse est nécessaire car jamais, dans
l’histoire, on a vu l’activité humaine arrêtée ainsi brutalement et
volontairement, entraînant des conséquences durables sur l’économie et les
sociétés.
Pour financer ce plan de relance, les
États autorisent exceptionnellement la Commission européenne à emprunter avec
leur caution. C’est une véritable nouveauté que d’aucuns analysent comme
historique. Il est vrai qu’emprunter en commun est un pas fédéral de plus vers
une plus grande unité parce que c’est une preuve de confiance mutuelle rare et
précieuse. De surcroît, « qui a emprunté empruntera » postule un vieil adage
populaire et l’on peut penser que l’Europe s’ouvre une marge de manœuvre
supplémentaire pour le futur. On sait, en effet, que les instruments européens
les plus fédéraux sont les plus efficaces : la Banque centrale, l’euro, etc.
L’Union s’ouvre donc des possibilités d’action nouvelles et cette avancée est
importante dans le contexte international.
La force de la
relation franco-allemande
Les Européens, qui ont longtemps pensé
n’avoir que des amis, se découvrent des ennemis, y compris parmi ses alliés. La
Chine, la Turquie, la Russie, mais
aussi les États-Unis de D. Trump mettent tout en œuvre pour affaiblir une
Europe qui demeure une zone de prospérité et de liberté unique au monde. Car la
réussite de l’intégration apparaît bien à ces rivaux alors qu’elle laisse trop
souvent indifférent en interne : l’Euro est la deuxième monnaie du monde, l’Union
européenne est la première zone commerciale de la planète, son niveau de vie et
son État de droit attirent et ses règles, si décriées parfois chez nous, font
pâlir d’envie ailleurs. Elle doit donc défendre son modèle et ses intérêts plus
résolument.
L’autre bonne surprise de ce sommet c’est la force de la relation
franco-allemande. À l’origine de ce plan, le couple des deux plus grands pays
de l’Union a fait cause commune tout au long de la négociation et partage
désormais la volonté d’asseoir la souveraineté européenne. Angela Merkel et Emmanuel Macron, unis comme jamais,
ont su garder leurs nerfs face aux réticences de petits États qui n’adhèrent
pas à cette vision d’une Europe plus puissante dans le monde. Ce fut difficile
mais un compromis à 27 ne peut pas être aisé. La magie des institutions
communes, c’est qu’on y parvient toujours.
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Il faudra vraisemblablement revoir les modes de décision du Conseil
européen car l’unanimité n’est pas la meilleure manière de décider. De ce point
de vue aussi, nous avons changé d’époque. Les temps présents exigent rapidité
et efficacité. Cet accord est de ce point de vue historique parce qu’il est le
commencement d’une autre Europe, qui change et évolue.
Si les Européens ne courent pas toujours aussi vite que souhaité, ils sont
au rendez-vous. L’Europe, ça marche. Elle le prouve une fois de plus.
(*) Président de la Fondation Robert Schuman
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