Tribune de Geneve (Rtg)
Éditorial - Le 31 Mars 2025
Erdogan et l’embarras de l’Europe
Les Européens condamnent d’une faible voix la répression des manifestants en Turquie. Car Ankara s’est rendue indispensable dans leur projet de défense commune.
La jeunesse qui se soulève ces jours-ci en Turquie n’a souvent connu que Recep Tayyip Erdogan. Elle a longtemps cru possible un changement de régime dans les urnes, et ce malgré toutes les mesures autoritaires qu’il a prises en plus de vingt ans de pouvoir. Car l’espoir de cette jeunesse était en partie nourri par l’exemple des démocraties européennes.
Aujourd’hui, l’Europe est embarrassée. Des chefs d’États condamnent mollement et chacun dans son coin les arrestations arbitraires des manifestants, l'étau qui se resserre sur la contestation, la fin de l’État de droit.
Mise en difficulté par Donald Trump dans les négociations d’une paix ukrainienne, l’Europe des valeurs et des principes en est à «quémander à la cour du Sultan», comme l’écrit un journal grec. La Turquie, dotée d'une puissance militaire incontestable – la deuxième armée de l’OTAN en effectifs – se pose en partenaire principal d’une défense commune.
En parallèle, l’amitié qu’Erdogan cultive avec Vladimir Poutine lui permet de se rendre indispensable en mer Noire. On a vu cette semaine les représentants turcs au sommet de Paris. Et la Pologne vient de réaffirmer son soutien à l'adhésion de la Turquie à l'UE, alors que les négociations sont au point mort. Justement en raison de la dégradation des droits fondamentaux dans le pays.
Les tiraillements politiques et moraux des Européens, alors que la Turquie d’Erdogan bascule dans l’autocratie, sont sans doute la dernière chose dont a besoin la jeunesse d’Istanbul.
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