Malgré les divergences, Trump et Macron louent la force du lien transatlantique
Les deux présidents ont tenu à afficher, jeudi, ce lien « indestructible » entre la France et les Etats-Unis, lors des cérémonies, en Normandie, du 75e anniversaire du Débarquement.
C’est un lieu éminemment symbolique que le cimetière de Colleville-sur-Mer (Calvados), petit bout de terre américaine sur le sol français. Là, devant les stèles de marbre blanc des 9 387 sépultures parfaitement alignées des soldats américains tombés lors du Débarquement, Emmanuel Macron et Donald Trump ont affiché, voire surjoué, le lien transatlantique, notamment celui entre la France et les Etats-Unis, lors des cérémonies du 75e anniversaire du « D-Day ».
Puis, assis côte à côte dans le salon de la préfecture de Caen, ils ont dans le même ton insisté sur cette amitié indéfectible entre les deux nations où, selon les mots du président français, « on ne peut séparer l’amour de la patrie et le goût de la liberté ».
« A chaque fois que la liberté ou les démocraties sont menacées, nous agissons ensemble, et donc nous allons poursuivre », a déclaré Emmanuel Macron avant leur tête-à-tête d’une demi-heure, suivi d’un déjeuner. Le but était d’afficher un retour à la normalité dans les relations franco-américaines, en surjouant à nouveau une relation personnelle à coup de grands sourires et de tapes dans le dos, même si le cœur n’y est plus tant les divergences sur l’Iran, le commerce international ou le climat ont ébranlé la proximité des débuts. En témoignent, côté français notamment, quelques petits coups de bec dans les discours.
« Faire vivre l’alliance de peuples libres »
« L’Amérique, cher président Trump, n’est jamais aussi grande que lorsqu’elle se bat pour la liberté des autres, l’Amérique n’est jamais aussi grande que lorsqu’elle se montre fidèle aux valeurs universelles que défendaient ses pères fondateurs », a déclaré Emmanuel Macron devant quelque 12 000 personnes réunies en surplomb de Omaha beach, détournant ainsi le slogan de campagne « Make America great again » de Donald Trump en 2016.
« Nous devons nous montrer dignes de la paix que nous avons en héritage. Et être dignes de la promesse de Normandie, c’est ne jamais oublier que les peuples libres lorsqu’ils s’unissent peuvent relever tous les défis », a rappelé le chef de l’Etat, exhortant Donald Trump à y rester fidèle. « Nous ne devons jamais cesser de faire vivre l’alliance de peuples libres », a-t-il insisté, citant entre autres les Nations unies (ONU), l’OTAN ou encore l’Union européenne (UE) comme exemple de ces alliances.
Il faut « retrouver le sel, saisir à nouveau les raisons de cet engagement », a déclaré le président français, qui se pose régulièrement en héraut du multilatéralisme face à la montée des égoïsmes nationalistes.
Un rappel très politique alors que la France préside cette année le G7, dont la prochaine réunion aura lieu à Biarritz (Pyrénées-Atlantiques) en août, et que le 45e locataire de la Maison Blanche multiplie depuis deux ans les décisions unilatérales ainsi que les critiques acerbes à l’égard de ces institutions issues de la seconde guerre mondiale. Sa conception est celle de relations bilatérales fondées sur les rapports de force.
Même si on n’est pas à l’abri d’un tweet venimeux de Donald Trump sur le chemin du retour, le président américain, qui a pris la parole après son homologue français, a su être à la hauteur de l’événement dans son discours à Colleville-sur-Mer.
« Vous êtes la fierté de notre nation », a-t-il lancé à l’adresse des quelques dizaines de vétérans américains présents, affirmant que « ces hommes ont traversé les flammes de l’enfer, portés par une force qu’aucune arme ne pouvait détruire : le patriotisme fervent d’un peuple libre, fier et souverain. » « Il y a soixante-quinze ans jour pour jour, sur ces côtes, sur ces falaises, 10 000 hommes ont versé leur sang et des milliers ont sacrifié leur vie pour leurs frères, leurs pays, et pour la survie de la liberté », a-t-il insisté, avant de louer les liens « indestructibles » entre les Etats-Unis et leurs alliés.
L’Iran au menu des discussions
Mais derrière cette normalité affichée, il reste les différences d’approche bien réelles, qui ont été abordées lors de la rencontre à la préfecture de Caen puis lors du déjeuner.
Au menu, il y a évidemment l’Iran. Les positions entre Paris et Washington sont très divergentes après le retrait américain de l’accord sur le nucléaire de juillet 2015, prévoyant la levée des sanctions économiques en échange d’un arrêt et d’une mise sous contrôle international du programme atomique iranien.
Washington a rétabli ses propres sanctions et veut mettre une pression maximum sur Téhéran. A l’opposé, Paris, comme Londres et Berlin, les deux autres capitales européennes signataires, espèrent convaincre la République islamique de rester dans l’accord. Mais si du propre aveu du président Emmanuel Macron, les méthodes divergent, Washington comme Paris partagent « les mêmes préoccupations » :
« Nous devons être sûrs que Téhéran ne se dote pas d’armes nucléaires. (…) Nous voulons réduire l’activité balistique et contenir leur activité régionale et surtout nous avons un quatrième objectif : celui de la paix dans la région. »
« Il y a une marge de manœuvre pour travailler ensemble »
Mais, comme l’a dit le président français devant son homologue américain, ces objectifs ne peuvent être atteints que par la« négociation ». Une manière de se démarquer nettement des postures guerrières d’une partie de l’administration Trump.
Les entretiens, notamment le tête-à-tête, plus long que prévu, se sont déroulés dans « un climat de confiance ». « Les sujets sont compliqués mais il y a une marge de manœuvre pour travailler ensemble », souligne l’Elysée, relevant qu’il est plus que jamais nécessaire d’avoir des marqueurs forts en cette période de tensions internationales.
Tous les grands sujets ont été abordés, depuis l’Ukraine jusqu’au Sahel en passant par la Libye et le Moyen-Orient. Mais l’Iran a été le plus longuement évoqué. « C’est un moment critique et notre rôle est de créer les conditions pour une désescalade », assure l’Elysée.
Donald Trump bombe le torse mais ne cesse aussi d’évoquer sa disponibilité pour négocier « a better deal » (un meilleur accord). En somme, Paris veut prendre Trump au mot. Même s’il ne cesse de changer de position.
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