Monday, April 15, 2024

Défense - Déclaration à la presse de M. Emmanuel Macron, Président de la République, depuis l'usine Eurenco (Bergerac, 11/04/2024) =Seul le prononcé fait foi=

 


2. Défense - Déclaration à la presse de M. Emmanuel Macron, Président de la République, depuis l'usine Eurenco (Bergerac, 11/04/2024)

=Seul le prononcé fait foi=

Q - Monsieur le Président, pourquoi est-ce que c'était important de produire la poudre en France alors qu'elle ne l'était pas avant ? À quoi ça sert ?

R - D'abord, vous le savez, ça fait deux ans maintenant qu'on en parle. Depuis l'agression russe en Ukraine, une nouvelle étape a été déclenchée. Nous avons décidé de rentrer dans cette économie de guerre. D'abord pour fournir ce que nous pouvions fournir aux Ukrainiens pour se défendre. Et puis on voit bien que le monde est en train de changer et que nous avons tous besoin de produire davantage à la fois pour soutenir l'Ukraine face à cette agression et pour nous protéger nous-mêmes.

Cette dynamique, elle est lancée partout en Europe et à travers le monde. La France a une force, son industrie. Elle a une force, son armée. Et donc cette économie de guerre, elle est aussi pour nous. Face à ce défi, vous en avez beaucoup entendu parler, l'une des forces de l'industrie française, ça a été de livrer ces canons CAESAR. Et donc ces canons, on a réussi à augmenter la cadence, on l'a triplée. Aujourd'hui, c'est un des éléments déterminants pour les Ukrainiens pour protéger leur territoire et ce qui fait aussi que nous sommes en train de vendre ces canons CAESAR un peu partout à travers le monde et que ça devient un produit d'export extrêmement puissant.

Ici sont faites les charges grâce à la mobilisation et je veux vraiment saluer Eurenco et l'ensemble des collaboratrices et collaborateurs. On est passé à temps complet. L'entreprise et l'usine tournent en permanence. Elle a augmenté ses cadences, aménagé son rythme, ce qui fait qu'on a doublé la production.

Deux choses vont être faites, on va aller plus loin. Un nouveau site pour les charges pour, par rapport à ce qui est fait aujourd'hui, encore doubler et donc produire plus de charges. Et dans les charges, on met ces poudres. Et on a tous fait le constat que si on voulait aller plus vite, sécuriser, il fallait qu'on maîtrise la totalité du processus. Et donc le choix industriel a été fait de relocaliser les poudres. Elles sont faites aujourd'hui dans le nord de l'Europe, dans un autre site, voilà, en Suède, et donc on les remet en plus de ce qui est fait en Suède, en France, parce qu'on va produire plus, parce qu'on veut produire plus vite et parce qu'on veut sécuriser les choses. Ce qui fait que grâce à ce choix et à cette transformation qu'on est en train de faire, d'ores et déjà, 76 millions d'euros ont été investis par l'Europe dans l'entreprise. Et c'est 500 millions d'euros que l'entreprise va investir sur les deux ans qui viennent, ce seront 250 emplois qui seront créés avec le doublement de la cadence encore sur les charges et avec la recréation des poudres.

Q - Monsieur le Président, est-ce que cette économie de guerre est compatible avec le déficit budgétaire alors que vous êtes accompagné du ministre des Armées et du ministre de l'Economie ?

R - Bien sûr, parce qu'elle produit de la richesse et on ne réduit pas les déficits en faisant moins d'industrie. C'est même l'inverse. Le problème du modèle français, ce contre quoi nous luttons depuis maintenant 7 ans et la bataille que nous sommes en train de réussir, c'est précisément celle de la réindustrialisation et de la création de richesse. La France a un modèle social généreux, c'est une force. On l'a même réarmé en investissant dans notre santé, dans notre école, etc. Mais ce qui ne correspondait pas à ce modèle social, c'est le modèle productif.

On avait laissé notre industrie partir, on avait une réponse face aux déficits, de tous temps, quelles que soient les majorités : taxer, ce qui fait qu'on était le pays le plus taxé d'Europe.

Nous, on a une stratégie claire : baisser les impôts pour relocaliser, être le pays le plus attractif en Europe, nous le sommes depuis 4 ans, réindustrialiser, c'est ce que nous sommes en train de faire. On recrée de l'emploi industriel. Créer de l'emploi. On a créé plus de 2 millions d'emplois et baissé de 2 points le chômage, et donc faire avancer le pays. Donc oui, l'investissement dans notre industrie, France 2030 dans l'innovation, l'investissement aussi dans notre recherche, notre innovation. L'investissement dans notre défense crée de l'emploi, et nous permet de baisser les dépenses sociales qui accompagnent et permet de créer de la richesse pour tout le pays.

Q - La guerre, c'est bon pour l'emploi ?

R - Je ne dirais pas les choses comme ça, je préfère la paix. Mais l'industrie, la réindustrialisation, c'est bon pour l'emploi et dans les industries, il y a les industries de défense.

Q - Et la trajectoire de la LPM sera respectée malgré le contexte budgétaire actuel ?

R - Bien sûr, et c'est ce que nous faisons depuis le début. Et vous savez, je n'ai pas attendu cette guerre pour prendre mes responsabilités sur les sujets de défense.

Je vais vous montrer, c'était préparé par le Ministre, mais ça montre très bien les choses. Sur les commandes, regardez les commandes que nous passons. Ça, c'est de l'investissement. Dès 2016, on a commencé à monter et en 2017, ça ne vous a pas échappé, on est passé de 9,5 à 15 milliards d'euros de commandes. Et là, nous sommes maintenant à 20.

C'est-à-dire qu'on a doublé les commandes militaires, donc on a donné de la visibilité à l'industrie de défense et derrière, on a créé de l'emploi. Depuis qu'on vote les LPM et que je suis Président, on les respecte au centime. Et derrière, on a justement une cadence qui est tenue.

Je voulais vous montrer ça parce qu'on parle d'obus. Ça, c'est très instructif. Quand j'ai été élu en 2017, on produisait 500 obus par an, ce qui explique que ce site avait été restructuré d'ailleurs en 2007 avec une grande difficulté sur toute la filière. En 2017, on a commencé à faire les choses parce qu'on n'a pas attendu la guerre en Ukraine. On avait vu que le monde devenait plus conflictuel et donc vous voyez qu'on est passé à 3.000 obus livrés par an dans l'industrie française. Et donc on avait commencé à réarmer notre dispositif, à investir. Et dès le début de l'agression russe, notre réaction, le discours que je fais à Eurosatory et l'économie de guerre, on passe de 3.000 à 15.000 par an et on va continuer de monter. Donc, vous voyez que derrière, il y a des choix industriels et une avancée.

Q - Monsieur le Président, il y a une conférence de paix sur l'Ukraine les 15 et 16 juin, qu'est-ce que vous pensez de cette initiative, est-ce que vous pensez que c'est le bon timing pour des négociations et la France sera-t-elle représentée ?

R - D'abord, je salue la Suisse pour son engagement. J'ai eu l'occasion d'en parler lors de la visite d'Etat de décembre dernier et je pense que c'est une très bonne initiative qui va permettre de rassembler tous les pays pour justement préparer les termes de la paix. Nous y travaillons étroitement et nous serons au rendez-vous proposé par la Suisse avec tous les pays qui veulent la paix durable, une paix qui respecte le droit international et les règles.

Q - Monsieur le Président, Volodymyr Zelensky entend vos efforts. Mais il alerte aussi que le pays pourrait perdre cette guerre si, notamment confronté à la baisse et au blocage des Américains, cette assistance n'arrivait pas assez vite. Qu'est-ce que vous lui répondez ? On a entendu cette logique d'économie de guerre, mais qui va prendre du temps à se mettre en place aussi.

R - D'abord, je veux ici vous dire que l'économie de guerre, ce n'est pas qu'elle va prendre du temps, c'est qu'on va encore augmenter. Mais quand j'entends les commentaires, je pense que les gens qui commentent souvent ne vivent pas dans le monde réel. On a triplé la production de canons CAESAR, on a d'ores et déjà doublé, on va encore doubler la production justement d'obus. On a réussi à accélérer, à diviser par deux les délais sur les MISTRAL, etc, etc.

On sait ce qu'on doit faire de plus sur certains autres types de missiles, certaines catégories, mais il y a déjà à marche forcée une transformation en profondeur de notre industrie. J'ai réuni ici, avec les ministres, les dirigeants d'Eurenco l'ensemble des industriels du secteur de la Défense pour justement constater ce qui avait été fait, mais davantage pour encore mobiliser. Comment on optimise nos financements, comment on simplifie les procédures pour aller plus vite, comment on mobilise mieux les financements européens, comment avec les projets export, on donne plus de visibilité au carnet de commandes pour aller plus vite donc ce n'est pas demain l'économie de guerre, c'est là et on accélère encore.

La France est au rendez-vous de ce qu'elle s'était engagée à livrer à l'Ukraine et nous avons toujours été vigilants à cela. C'est-à-dire ne pas sur promettre, mais promettre exactement, comprendre les besoins et livrer en temps et en heure tout ce qui était utile. On l'a toujours fait et le président Zelensky le sait et nous continuerons de le faire. Ensuite, il y a des risques qui sont liés en effet à des choix politiques de certains autres alliés. Nous devons déjà nous féliciter qu'ils soient à nos côtés et qu'ils aient tant fait. Et donc, face à ces derniers, nous, nous devons être prêts à accroître et accélérer notre offre. C'est tout l'effort qui est fait, par exemple sur les CAESAR où cette année, on va produire 75 canons CAESAR qui seront livrés à l'Ukraine. C'est beaucoup plus que ce qu'on a livré depuis le début de la guerre. Donc, on accroît les choses. On continue sur les missiles justement, qui permettent d'atteindre dans la profondeur sur le sol ukrainien les capacités russes qui leur font si mal. Et là aussi, on va accroître les livraisons.

Maintenant, face à ça, les Européens doivent être prêts. C'est tout le sens de ce que j'ai pu dire en février dernier. C'est-à-dire que nous, Européens, on doit faire plus et plus vite. Mais si les financements américains ne sont pas là, nous, Européens, nous devons nous mobiliser et donc, en Européens, bâtir des solutions de financement nouvelles. Nous y travaillons main dans la main avec l'Allemagne et nous avons eu l'occasion de sécuriser des premiers financements, la facilité européenne de paix, l'aide budgétaire et donc, ces fameux 50 milliards qu'on a décidés en février pour l'Ukraine. Mais on devra peut-être décider de faire davantage si les Américains ne sont pas au rendez-vous. Nous, nous ne pouvons pas lâcher l'Ukraine parce que l'Ukraine, c'est à 1.500 kilomètres d'ici, c'est-à-dire, c'est notre propre sécurité, c'est la possibilité pour l'Europe d'être en paix.

Q - Ce matin, vous avez rappelé dans votre discours qu'on est dans un moment où on parle beaucoup de l'Europe. Beaucoup parlent dans le cadre des élections européennes. Vous teniez à faire cette petite allusion aussi en lien avec votre déplacement aujourd'hui, rappeler le contexte dans lequel on est à l'approche maintenant des élections européennes ?

R - C'est très important parce que l'Europe est aussi un des éléments de notre souveraineté, de notre sécurité collective. Quand, il y a 6 ans, je parlais d'Europe de la défense à la Sorbonne, et que beaucoup des commentateurs disaient : "c'est une lubie française". Europe de la défense, depuis le milieu des années 50, on a lâché cette affaire, ce n'est pas vrai, ça ne marchera pas.

Je constate qu'on a mis en place la facilité européenne de paix, un fonds de défense, qu'on a pris une boussole stratégique qui s'est conclue sous présidence française, que nous avons mis en place maintenant un investissement, une stratégie européenne de défense, ça a été une vraie révolution des dernières années et c'est une révolution qui a été portée, poussée par la France. Ce qui fait que l'Europe, elle pense maintenant sa défense elle-même, elle pense sa sécurité et pas simplement comme avant ou en quelque sorte, elle l'a dédiée à d'autres, elle l'a déléguée et principalement pour beaucoup aux Américains. Nous le faisons main dans la main avec les Américains, mais on a besoin de ce pilier européen de l'OTAN, qui passe par l'Europe de la défense. C'est important de le rappeler parce qu'on a toujours l'impression que les choses se font naturellement. Ça a été notre engagement, notre force, notre crédibilité et notre crédibilité de Français et d'Européens.

Q - Monsieur le Président, dans le contexte des finances publiques qu'on connaît pour le pays, est-ce que vous avez un désaccord et un différend avec le ministre de l'Economie qui est juste là, derrière vous ?

R - Mais vous plaisantez ! Il n'y a pas de désaccord dans la politique française. Il n'y en a jamais eu parce que ça ne marche pas comme ça et parce que ce n'est pas la manière dont on travaille depuis 7 ans avec le ministre de l'Economie et des Finances. On a une stratégie qui produit des résultats, un cap. J'ai souhaité que le Ministre puisse exprimer très clairement celui-ci, comme il l'a fait hier pour proposer justement de nouvelles stratégies.

C'est très simple, nous avons eu un choc conjoncturel, c'est ça ce qui s'est passé, en fin d'année dernière, qui a été plus brutal, plus rapide qu'attendu, largement en raison du ralentissement, de la récession allemande, du ralentissement italien et des économies européennes qui nous entourent. Ce qui fait qu'on a eu un déficit qui s'est dégradé en 2023 plus important et une croissance en 2024 plus faible qu'attendu. C'est très simple. Nous, on dit : est-ce que notre stratégie est mauvaise ? Non, elle produit des résultats. On est les plus attractifs d'Europe, on a une des meilleures croissances de la zone euro, on crée des emplois et on se rapproche des autres, là où on avait une maladie française qui était le chômage. Plus personne n'en parle du chômage. Formidable ! C'est notre boulot collectif. On a baissé de deux points. Et donc, tout ça, c'est bon, il faut le garder.

Par contre, on doit en responsabilité répondre à ce choc conjoncturel. Et donc, la ligne, elle est simple, elle a été réaffirmée. 1) on garde le cap : plein emploi, réindustrialisation, réarmement de nos services publics. 2) on ferme tout de suite l'hypothèse de dire qu'on va régler ce choc conjoncturel par plus d'impôts : maladie française. Ça enlèverait de la confiance, on garde la confiance des ménages, des entreprises, de nos partenaires. 3) dire : "on est responsable. Ce choc conjoncturel, on doit y répondre de manière appropriée et tout de suite". Ça a été les premières économies sur le financement de l'Etat et c'est la deuxième partie après le même taux d'effort d'économies pour tenir un déficit de 5,1 cette année. Voilà notre ligne. Elle est simple, elle est cohérente et elle est celle qu'à mes côtés, le Ministre porte depuis 7 ans avec beaucoup de constance et avec les résultats qu'on connaît. C'est notre ligne. On y croit. Elle produit des résultats et on a la confiance des acteurs économiques pour ce faire.

Q - Sur le projet de loi de finance rectificative ?

R - Non, parce qu'on n'en a pas besoin pour ce faire. Ceux qui veulent des projets de loi de finances rectificative, pour beaucoup, c'est pour faire des impôts en plus. Moi je ne pense pas que la réponse, ce soient des impôts en plus. Il faut garder la ligne.

Q - Monsieur le Président, quelle est la place de Bergerac dans la stratégie de défense ?

R - Bergerac a une place importante parce que site historique. Alors la région d'abord a une place très importante. Je veux ici le rappeler. On est dans une région où l'industrie de défense, où les armées ont une place essentielle. La DGA, plusieurs bases aériennes, plusieurs régiments aussi terrestres y sont présents et permettent des forces spéciales à la surveillance de notre espace aérien, de protéger les Françaises et les Français. Nous avons ici à peu près tous les industriels de défense qui sont présents dans la région. Dassault, Airbus, Safran, Thalès et j'en passe et Eurenco. Et Bergerac a ce site historique, vous en voyez d'ailleurs le caractère historique en étant ici présent et là où ce site était il y a 15 ans, avec un point d'interrogation... D'abord, il y a eu toute la réorganisation que nous avons faite des poudres et explosifs ces dernières années, qui a été vraiment une réorganisation de l'industrie française. Tout l'effort que mène Eurenco et qui est absolument clé pour notre souveraineté et la protection de nos alliés, en particulier de l'Europe. C'est un site qui a su se moderniser et donc Bergerac a su être au rendez-vous justement de l'histoire et de la transformation de ces industries de défense. 75% de ce qui est fait par Eurenco, c'est pour l'export. Il ne faut jamais l'oublier. Et maintenant, compte tenu de ce nouveau contexte, c'est un site qui va se redéployer. C'est un beau symbole, là où nous étions ce matin. Il y a un peu plus de 100 ans, pendant la Première Guerre mondiale, vous aviez sur ce qui était devenu cette friche, de la production de poudre pendant la Première Guerre mondiale, à un moment où le site avait plusieurs milliers d'employés. Il avait été fermé. Il était tombé en déshérence, c'était en effet devenu une friche. Elle avait même été dépolluée et elle allait vers d'autres activités peut-être non industrielles. Grâce à cette remobilisation et cet investissement sur ce qui était devenu une friche, on va refaire une emprise industrielle et ici, refaire des poudres. Donc Bergerac est pour moi l'image de cette reconquête industrielle et de cette souveraineté militaire que nous voulons pour nous-mêmes et pour l'Europe.

Q - Est-ce que Monsieur le Président, vous avez une réaction par rapport à ce qui s'est passé hier soir à Bordeaux ?

R- Je ne vais pas faire de commentaires ; la procureure aura à s'exprimer. Je veux avoir simplement une pensée pour la victime et remercier les forces de l'ordre qui sont intervenues si rapidement.

Q - Est-ce que vous voyez un signe d'ensauvagement dans la société ?

R - Je ne vois pas de signe... je ne fais pas de commentaire sur tout ça. Ces deux mots suffisent.

Q - Merci beaucoup.

R - Merci à vous. Bon courage. Bon retour à tous et toutes./.

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